mercredi 8 août 2007

L'arroseur arrosé

Finalement, il aura fallu 26 ans avant que les conséquences absurdes de la loi "Moureaux" de 1981 sur les actes racistes ne se fassent réellement sentir. Un étudiant congolais vient en effet de déposer plainte contre la fondation Moulinsart, qui gère les publications des aventures de Tintin depuis la mort de son créateur. Son objectif : faire interdire la vente de "Tintin au Congo".

Voilà ce qui finit inmanquablement par arriver lorsqu'on musèle la liberté d'expression. Les objectifs louables du début(enfin, si tant est qu'il soit louable d'empêcher les gens de dire ce qu'ils pensent, même si cela nous déplaît) finissent par céder la place aux procédures imbéciles. Impossible de réprimer les tracts racistes d'un parti d'extrême-droite sans encourir le risque de voir attaqués les chefs d'oeuvre de la littérature, de la bande dessinée ou du cinéma. Car hélas les bien-pensants ne s'arrêteront pas là. Je propose à monsieur Mbutu Modondo de déposer plainte en Grande-Bretagne contre William Shakespeare (Othello n'est-il pas noir ?), aux Etats-Unis contre H.P. Lovecraft (dans "The Call of Cthulhu", il parle de mauvais quartiers "fréquentés par les noirs et les métis"), et bien sûr, en France contre Louis-Ferdinand Céline. Mais pourquoi s'arrêter là ? Pourquoi ne pas faire embastiller Michel Leeb ("c'est pas mes lunettes de soleil, c'est mes narines"), Benoît Poelvoorde ("ah non hein Rémi, moi je ne touche pas à ça ! Le SIDA, les singes verts"), et condamner Pierre Desproges et Coluche post mortem. Car, depuis le procès infâmant fait à Patrick Timsit pour une tirade de mauvais goût, les comiques ne sont plus à l'abri des foudres de l'Inquisition du 21ème siècle.

Tout doucement, les social-démocraties occidentales s'enfoncent dans une dictature molle qui ne dit pas son nom, où tout ce qui n'est pas conforme à la norme du moment devient un délit d'opinion. "Mille sabords !", aurait dit le capitaine Haddock.




2 commentaires:

Alexis a dit…

Il est bon de vous relire cher Constantin.
Au sujet de la bien pensance, rien de tel que l'Empire du Bien de Philippe Muray.
J'en viens de plus en plus à regretter que le ridicule ne tue pas.

Constantin a dit…

Merci cher Alexis, je dois dire que je suis assez content que l'inspiration revienne.

Je rajoute illico cet opus de Muray à ma liste de lecture. Je viens pour ma part d'achever "La tyrannie de la Pénitence : essai sur le masochisme occidental" de Pascal Bruckner qui traite sensiblement du même sujet.

Tiens, au passage, n'est-ce pas Muray l'inventeur de la géniale expression "mutins de Panurge" désignant la foule des altermondialeux écolo-bobos ?